Après la Belgique, nous continuons sur les Hauts-de-France toujours par L'Escaut et les écluses de Fresnes-sur-Escaut, Bruay sur Escaut, Folien à Valenciennes et de Trith-Saint-Léger, où on a dormi amarré à l'Apollo qui lui était en couple du Daru.
Départ à 6h30, nous commençons par l'écluse de Denain, puis celle de Pont Malin. Au niveau de la ville d'Arleux, nous prenons direction du canal de la Sensée et passions 7 écluses : Palluel, Marquion, Sains-lès-Marquion (deux écluses), Moeuvres, Graincourt-lès-Havrincourt et Hermies pour dormir avant le Souterrain de Ruyaulcourt. Canal du Nord
Départ à 9h00, nous traversons le souterrain de Ruyaulcourt, les écluses Moislains 8 et 9, Allaines, Feuillaucourt, Cléry-sur-Somme, Péronnes. Toutes ces écluses se trouvent sur le Canal du Nord. Nous nous dirigeons vers le Canal de la Somme, empruntons l'écluse d'Epénancourt puis de nouveau le canal du Nord avec l'écluse de Languevoisin. Nous passons le tunnel de la Panneterie et dépassons la ville de Campagne pour la nuit. Fluvial Carte
Démarrage par l'écluse de Campagne, Sermaize, Noyon avant de s'engager dans le Canal latéral à l'Oise, à gauche au niveau de Pont l'Evêque, les écluses Sempigny et de Saint Hubert, à droite canal de l'Oise à l'Aine, Abbécourt, Guny, Nogent / Crécy, Leuilly, Vauxaillon. pour dormir à la halte nautique de Pïnon.
On démarre la journée par les écluses de Pinon, Chaillevois, Chavignon, Pargny-Filain, on enchaine par le tunnel de Braye-en-Laonnois puis les écluses de Moulin Brûlé, Metz, Moussy-Soupir et Verneuil nous quittons le canal de l'Oise à l'Aisne et on rejoint le canal latéral à l'Aisne. Au niveau de Pontavert, nous changeons de région.
Jour 5 : Baudour - Denain (87 km)
Après la frontière française, nous avons enchaîné toutes les heures avec des écluses : Fresnes-sur-l'Escaut, Bruay, Folien (Valenciennes) et Trith-Saint-Léger. On peut voir sur la dernière photo les deux bateaux qui nous accompagneront encore pendant un moment...
De notre droite arrivaient tous les bateaux qui avaient emprunté l’Escaut. Une écluse était en panne et a dû rattraper 15 bassinées (ensemble des manœuvres nécessaires au franchissement d’une écluse) d’affilée après sa réparation. Nous nous sommes donc retrouvés en plein embouteillage d’écluse ! Nous avons attendu près de 2 heures pour emprunter la première. Et nous en avions 7 à faire pour arriver à notre prochaine pause : 1 Palluel, 2 Marquion, 3 & 4 Sains-les-Marquions, 5 Moeuvres, 6 et 7 Graincourt. Aussi, devant nous et l’Apollo se trouvait le Gigi, un bateau de 6 mètres de largeur alors que les écluses en font 6,5. Il est tellement juste qu’il doit y aller très lentement à chaque écluse. Le Daru, voyant bien la galère qu’allait être cette journée, a décidé d’aller s’amarrer pour la journée et de rejoindre son chalet sur terre pour reprendre dès la première bassinée le lendemain matin et enchaîner les 7 d’un coup. Pour l’anecdote : les propriétaires du Gigi, du Daru et de l’Apollo font tous partie de la même famille !
Jour 6 : Denain – Tunnel de Ruyaulcourt (50 km)
De toutes les journées que nous avons eu à passer sur la Stregatta, celle-ci est certainement la plus longue que nous ayons eu à vivre. En temps comme en ressenti !
Nous nous étions arrêté la veille à l’écluse de Denain afin de pouvoir suivre le Daru et l’Apollo. Comme je l’indiquais dans les tout premiers posts, il y a une priorité à respecter en navigation : d’abord les bateaux commerciaux puis ceux de plaisance. Là où nous nous sommes engagés, les écluses ne peuvent pas accueillir de bateaux de plus de 80 mètres. Généralement, les bateaux les plus longs sont des 38 mètres avec une barge devant de taille identique. Cela signifie que si un 38 mètres sans barge accepte que nous éclusions avec lui, alors nous pouvons le suivre à travers toutes les écluses. Sinon, nous devons attendre que tous les bateaux plus grands passent !
Après l’écluse de Denain, que nous avons passée à 06:30 précises, nous sommes passés par celle de Pont-Malin puis nous avons continué tout droit pour suivre le canal de la Sensée.
A hauteur d’Arleux, nous nous sommes engagés sur notre gauche sur l’écluse de Palluel, qui marque le début du Canal du Nord. Et c’est là que les ennuis ont commencé…
Au total, nous avons mis 9h30 pour faire 15 km. Cela nous a paru long… Heureusement que nous avons l’Apollo pour nous guider sur plusieurs jours, cela nous confère une aide précieuse. Il s’occupe de nous annoncer à chaque écluse pour être sûr qu’on passe avec lui, il nous éclaire la nuit et nous indique la route à suivre pour la suite. Et ça paye : à l’écluse 3, le Ferris (plaisancier néerlandais), que nous avions eu avec nous à la sortie d’Anvers, a doublé tout le monde pour s’amarrer devant l’écluse. La raison ? Un changement de shift des éclusiers qui ne se sont pas transmis l’information et qui ont demandé au Ferris d’embrayer après l’Apollo.
Résultat : ce dernier s’est reculé juste en-dessous de la porte de l’écluse pour l’empêcher d’entrer, est sorti de son bateau et l’a insulté en flamand
Depuis qu’on est arrivé en France, les bittes d’amarrage des écluses ne sont plus automatiques : elles ne se lèvent ou ne se baissent pas en même temps que l’eau de l’écluse. Cela signifie que l’on doit décapeler-capeler à chaque montée ou descente pour s’assurer que le bateau reste amarré et ne se balade pas dans l’écluse. Ou pire, aille taper contre la porte de l’écluse
Afin de ne pas perdre plus de temps que nécessaire, nous avons continué jusque tard à suivre l’Apollo. Dès qu’il croisait un bateau, il éteignait les projecteurs... et nous n’y voyions plus rien ! L’un de nous éclairait les berges à la torche, ce qui n’est quand même pas l’idéal pour naviguer. Mais nous n’avons pas le choix que de suivre l’Apollo jusqu’à demain, au moins !
Étant donné que nous sommes arrivés devant le Tunnel de Ruyaulcourt après 19h30, nous avons dû s’amarrer devant pour la nuit. Nous avons navigué 14 heures quand même. L’Apollo nous a offert l’apéro, ce qui était bienvenu après cette journée compliquée.
Comme je l’indiquais en story, les horaires pour passer des écluses, faire lever des ponts et passer des tunnels en semaine est de 06h30 à 22h30 (exception pour le tunnel de Ruyaulcourt, qui s’arrête à 19h30).
Le dimanche, c’est presque repos : 09h-18h00. Demain matin, c’est donc « grasse matinée » jusqu’à l’ouverture du tunnel.
Jour 7 : Tunnel de Ruyaulcourt - Tunnel de la Panneterie (57 km)
Journée tout en calme, nous profitons du guidage de l'Apollo au maximum.
Nous commençons la journée par le passage du Tunnel de Ruyaulcourt dès son ouverture, à 09h. Quel bonheur de ne pas commencer aux aurores ! Ce tunnel fluvial, long de 4 350 m, permet de franchir le seuil du Cambrésis. Il est doté d'une gare centrale de 1 150 mètres en son centre permettant le croisement de bateaux. En France, il est le seul à posséder cet aménagement. Le poste de commande se trouve à la tête nord du passage souterrain, et la surveillance de l'ouvrage se fait par un éclairage continu et des caméras.
La navigation est ralentie dans le tunnel et nous sommes constamment attiré par le flanc gauche. On nous avait prévenu : ce tunnel est protégé par du caoutchouc à gauche comme à droite, la coque du bateau sera un peu moins blanche après le souterrain.
Après le tunnel, nous nous engageons dans un long bief puis sur plusieurs écluses très rapprochées : 8 et 9 Moislains, 10 Allaines, 11 Feuillancourt, 12 Cléry-Sur-Somme, chacune à 1 km d'écart ! La frustration que nous avons lorsqu'elles sont si rapprochées est que nous devons rester au point mort, poussés par le courant, car nous devons attendre qu'elles soient prêtes tout en restant suffisamment loin de l'Apollo pour le laisser manœuvrer.
Nous en profitons donc pour admirer le paysage et sa faune. Sur la 3e photo, vous apercevrez un héron cendré. Nous en croisons depuis quelques jours. Pour les ornithologues parmi vous : le héron cendré se caractérise par un long cou, un long bec pointu et de longues pattes. Il atteint en général 95 cm de hauteur et une envergure de 1,85 m pour une masse de 1,5 à 2 kg. C'est le plus commun des hérons d'Europe.
Après 8 km de bief, nous apercevons le port de plaisance de Péronne où Laury voulait s'arrêter la veille au soir.
De nuit, cela aurait été impossible pour nous de s'y amarrer car l'entrée est jalonnée d'IPN (poutrelles en fer en I). Elle aura été un peu optimiste, en temps comme en capacité de s'amarrer.
Après l'écluse de Péronnes, nous quittons le Canal du Nord pour le Canal de la Somme et après l'écluse d'Epenancourt,
nous reprenons le canal du Nord.
Nous passons encore une écluse, celle de Languevoisin, avant d'entamer le deuxième et dernier souterrain de la journée : le tunnel de la Panneterie, long de 1,1 km. Etant donné que nous sommes dimanche, nous devons nous arrêter "tôt" car les écluses ferment à 18 heures. Cela fait du bien de faire des journées courtes aussi - mais quand on y pense, on a fait autant de kilomètres aujourd'hui que la veille, en naviguant 5 heures de moins !
Jour 8 : Tunnel de la Panneterie - Pinon (53 km)
Réveil en douceur pour la Stregatta : l'Apollo nous a tiré jusqu'à l'écluse de Campagne pour prendre la première bassinée à 7 heures. Naviguer dans le brouillard n'est pas simple : dès qu'il nous a lâché, nous avons eu quelques difficultés à suivre l'Apollo que nous ne voyions parfois plus !
C'est extraordinaire de voir la faune autour de nous, car nous passons par des lieux extrêmement calmes : canards, hérons, ragondins. Certains jours, nous avons droit à des concertos
Nous empruntons encore trois écluses avant de changer de canal : Sermaize, Noyon et Pont l'Evêque. Cela laisse au brouillard le temps de se lever avant de s'engager dans le Canal latéral à l'Oise, à gauche au niveau de Pont l'Evêque.
Une fois sur le Canal latéral à l'Oise, nous expérimentons une nouveauté : les écluses manuelles !
C'est sur les écluses de Sempigny et de Saint Hubert que nous expérimentons ce nouveau fonctionnement. Rien de compliqué, mais il nous a fallu du temps pour comprendre surtout pour Laury qui continuait à appeler avec la VHF. Les habitudes - après seulement une semaine - ont la vie dure !
Pour la première écluse, nous avons dû tirer sur la manette de la 1re photo.
Une fois dans l'écluse, nous avons dû tirer sur la tirette bleue qui permet de fermer les portes et enclencher la bassinée. Enfin, nous avons reçu une télécommande de la machine qui nous permet de déclencher chaque écluse manuellement.
Le temps de comprendre le fonctionnement de cette écluse manuelle, nous en profitons pour marcher, prendre des photos et mettre de l'eau potable.
Chaque écluse fonctionne avec des feux. Rouge : non prête. Rouge-orange : l'écluse prend en compte notre demande d'ouverture après pression du bouton correspondant sur la télécommande. Rouge-vert : en préparation. Vert : on peut s'engager. Si on voit qu'un feu revient rouge après avoir été rouge-orange, nous pouvons supposer qu'un bateau est déjà dans l'écluse.
A la fin du canal latéral à l'Oise, nous tournons sur la droite et empruntons le canal de l'Oise à l'Aisne. C'est ici que nous disons au revoir à l'Apollo et le remercions pour son aide précieuse. Lui continuera vers Paris. Désormais, nous ne pourrons plus naviguer de nuit !
C'est parti pour le fameux canal d'Abbécourt (canal de l'Oise à l'Aisne... pour vous aussi, ça devient compliqué ?). Au fur et à mesure, nous nous engageons dans des canaux plus étroits, avec bien moins de circulation. Cela nous arrive de passer des heures sans voir personne !
Comme les écluses sont automatisées avec la télécommande, nous passons un certain nombre d'anciennes maisons d'éclusier désertées. C'est dommage, certaines sont mignonnes. Nous croisons même deux bateaux dévastés, ce qui nous rend un peu triste dans ce paysage si sympathique.
Nous nous engageons sur une série d'écluses : Abbécourt, Guny, Nogent / Crécy, Leuilly, Vauxaillon.
En fin de journée, les couleurs sont magnifiques et nous profitons du calme ambiant : il n'y a plus de voie verte pour les passants et nous sommes bien éloignés des routes. Les villages les plus proches comptent environ... 180 habitants
Nous nous arrêtons pour la nuit à la Halte nautique de Pinon. On retrouve les difficultés de naviguer de nuit, on ne voit plus grand chose et on en paie les frais : une branche plantée en I dans la vase nous a fait faire un bond surprenant ! Heureusement, il n'y a eu aucun dégât notable sur la coque.
A Pinon, nous en profitons pour faire des courses et mettre de l'essence dans des jerricans. Ce n'est pas une mince affaire, quand on sait que chacun fait 20 litres et qu'il y en a trois. Pascal et René ont fait 4 voyages avec les jerricans plein, avant de remplir les cuves avec. Permettez-moi cette blague : ils étaient rincés !
Anecdote : le château de Pinon, l'église et la mairie, ainsi que la majorité des maisons de la commune sont entièrement détruits pendant la guerre 1914-1918 et témoignent de l'intensité des combats.
Jour 9 : Pinon - Courcy (54 km)
Autant hier nous ne pouvions pas y voir à un mètre au réveil, autant ce matin... quel beau temps ! Et caractéristique du beau temps en décembre : quel froid ! Tout autour de nous était gelé, même les cordes, ce qui a rendu les 4 premières écluses très drôles à passer : Pinon, Chaillevois, Chavignon, Pargny-Filain. Pont glissant, cordes raides, René et Laury se sont amusés à l'avant.
C'est moins le cas de Pascal, au moteur, qui a dû éponger le diesel qui a fui lorsqu'ils l'ont rajouté hier soir avec les jerricans.
S'en est suivi une bonne séance de nettoyage de toute la Stregatta, afin d'enlever l'odeur de diesel et le gel du pont.
Nous sommes passés le long du lac de Monampteuil. C'est assez surprenant de voir un plan d'eau plus haut que le nôtre ! Des vannes se situaient un peu plus en amont pour réguler si besoin. Ce plan d'eau accueille une base de loisirs à l'image du Lac de Saint Ferréol pour les toulousains.
Encore un tunnel : celui de Braye-en-Laonnois. Celui-ci fait une longueur de 2,3 kilomètres et a été ouvert à la navigation le 28 avril 1890. Pour la première fois en France, l'air comprimé fut utilisé pour refouler les eaux.
Patapon le Héron nous aura suivi tout le long de ce tunnel et un peu après encore.
[Anecdote]
Ce tunnel se situe en-dessous d'une crête tristement célèbre : Le Chemin des Dames. Ce qu’on appelle le plateau du Chemin des Dames est la partie des plateaux du Soissonnais qui s’étend entre les vallées de l’Aisne au sud et de l’Ailette au Nord. À son extrémité Est, cet étroit plateau constitue un promontoire qui domine la plaine entre Laon et Reims.
On l'appelle ainsi car il était emprunté jadis par les "Dames de France", (les filles du roi Louis XV).
L’intérêt stratégique d’une telle position est apparu dès l’Antiquité. Le plateau lui-même devient un champ de bataille dès le VIe siècle mais il entre vraiment dans l’histoire avec la bataille dite de Craonne que Napoléon Ier livre le 7 mars 1814 au cours de la Campagne de France.
La guerre de 1914 révèle toute l’importance stratégique du plateau. Après la bataille de la Marne, les Allemands s’accrochent à ces hauteurs de la Marne pour repousser les attaques françaises et britanniques (septembre-octobre 1914).
L’année 1917 place le Chemin des Dames au centre des événements militaires. En décidant d’attaquer le 16 avril entre Soissons et Reims, le général Nivelle compte sur la surprise pour remporter au Chemin des Dames une victoire décisive avec un million d’hommes. Censée être rapide et décisive grâce aux tout premiers chars de combats, elle tourna cependant au fiasco et les combats dureront finalement jusqu'au 25 octobre 1917, engendrant des pertes colossales dans les deux camps.
Une fronde naquit à l'arrière qui débouchera sur des mutineries et 26 hommes furent fusillés pour l'exemple.
La victoire française de La Malmaison (23 octobre 1917) amène les Allemands à abandonner le plateau et à se replier au Nord de l’Ailette.
Sur les 18 écluses prévues en ce 9e jour, nous en passons encore 4 avant de changer de canal : Moulin Brûlé, Metz, Moussy-Soupir et Verneuil.
Une fois cette dernière passée, le canal de l'Oise à l'Aisne rejoint le canal latéral à l'Aisne, en passant sur un pont-canal au-dessus de l'Aisne.
Et ça se sent : le volume d'eau change sacrément et nous avons l'impression de ne plus avancer dans le courant. Suite en Grand-Est.